Le temps des vacances est arrivé et avec lui l’envie de bouger, d’aller voir ailleurs pour faire le plein d’images !
C’est le mot « TOURISME » qui est proposé et pour l’illustrer j’ai choisi l’étonnante photographie de Martin Parr prise en Turquie en 1994.
C’est une image emblématique qui caractérise le tourisme (une certaine forme) avec pertinence et ironie. On y voit un touriste occidental habillé de façon décontractée qui chevauche une monture. Un guide local les accompagne. Deux mondes se côtoient, celui aisé et supérieur du touriste et l’autre plus modeste du guide. Deux échelles, deux plans. Celui du riche et l’autre, du pauvre.
On voit tout de suite ce que Martin Parr a vu, inutile de s’appesantir. Martin Parr trace un portrait sans complaisance de la société contemporaine occidentale. Ses interrogations sont celles d’un sociologue muni d’un appareil photographique. En chroniqueur génial du quotidien il s’attache à creuser dans l’ordinaire. Il plante son regard de documentariste teinté d’un humour typiquement anglais sur ce quotidien bourgeois.
En vacances, quand on se mue en touriste l’espace d’un temps -toujours trop court – on est tenté d’essayer de tout voir. On voudrait tout prendre pour une fois rentré, se souvenir de tout. On a tellement peur d’oublier, de passer à côte de quelque chose d’important…
Les photos ne coutent plus rien aujourd’hui, les cartes mémoire permettent d’enregistrer 10 000 clichés qu’on peut regarder ensuite (et tout de suite) gratuitement sur son smartphone, sa tablette, sa télé, son écran d’ordinateur…
Pourquoi se priver ?
A Venise, on ira vers le Pont des soupirs, à Paris ce sera évidemment la tour Eiffel, à New York la Statue de la Liberté, à Athènes l’Acropole, à Londres Buckingham Palace of course ! J’en passe. On ira là où tout le monde va parce que c’est ce qui rassure.
Attention ! Les clichés faciles, les cartes postales nous pendent au nez ! Le piège est tendu. Le réflexe d’essayer de tout prendre c’est hélais aussi celui qui nous fait tomber. On veut tout prendre pour être sûr de ne rien rater. On va peut-être même ne pas vraiment regarder « avec ses yeux » ce qu’on prend, on va se contenter de viser à travers l’œilleton de notre appareil et déclencher, déclencher, déclencher ! On aura toujours bien le temps quand on rentrera pour trier, jeter, partager et voir enfin ce qu’il fallait voir !
En regardant l’image du touriste juché sur le dos du cheval on a le sentiment qu’il a probablement l’œil vissé en permanence au viseur de sa caméra. Il ne semble pas profiter du moment présent car il est occupé à une autre chose. Le fait qu’il chevauche caméra au poing (situation inhabituelle pour un cameraman) ajoute à la scène une touche d’absurdité et le grotesque de la situation apparaît et nous fait sourire.
Martin Parr a construit au fil des années son « théâtre de l’ordinaire » joyeux et effrayant. Ses représentations prennent tout leur sens et au delà du sourire, elles suggèrent un certain ridicule; il nous montre un monde fait de plages bondées, de couples qui s’ennuient, de familles pique-niquant au milieu des immondices, de centres commerciaux aux couleurs criardes, d’animaux domestiques affublés de costumes excentriques etc.
Ses compositions « sur le vif », de près, avec flash même en pleine journée sont implacables, elle soulignent le chaos dans lequel la société est plongée et proposent simultanément une réflexion sur l’authenticité de nos désirs et de nos besoins.
Le critique d’art Val Williams (auteur d’un très bon livre sur Martin Parr) dit de lui « Les photographies de Martin Parr créent un malaise parce qu’elles nous mettent à nu, elles nous montrent pédants et nais, snobs et cyniques. Ses photographies sont comme des farces ; apparemment bienveillantes elles nous traitent d’imbéciles ».
Depuis le début, le marathon invite à donner d’un mot, un point de vue singulier.
Sur le « TOURISME » Martin Parr a donné le sien.
A vous de donner le vôtre.
Martin Parr est britannique. Il est né en 1952. Il a étudié la photographie à Manchester. Après avoir suscité de nombreux débats en raison de son style provocateur voire cynique il devient membre de la célébrissime Agence Magnum en 1992. Depuis son adhésion, il ne cesse d’exposer et de publier. Ses photographies font désormais partie du patrimoine culturel.
Mais où vas tu trouver tous ces exemples…trop bon…
Entre le mot touriste qui fait évidemment penser aux vacances et le mot moitié qui fait penser à l’amour … Pimprenelle va prendre de la distance, histoire de réfléchir, de prendre du recul.