Voici une invitation à la promenade !
C’est le mot « SENTIER » qui est proposé cette semaine et pour l’illustrer j’ai choisi une image de Balthazar Burkhard qui fait la part belle à la nature et son exubérance.
Dans cette image tirée de la série « paysages alpin », le sentier ne joue qu’un rôle secondaire, il est à peine visible, on le devine plus qu’on le voit ; Il chemine comme un ruisseau dans les hautes herbes parmi les fleurs.
Il conduit au lac vers l’eau paisible.
Le peintre que dis-je, le photographe (lapsus révélateur) a utilisé un appareil grand format et travaillé avec minutie. Imprimée, la photographie mesure 1 mètre et 20 centimètres, tous les détails sont rendus avec une très grande précision, comme s’il avait employé un fin pinceau (re-lapsus).
Il a posé sur le paysage un regard attendris.
Sensible au chatoiement des couleurs, aux petites touches jaunes, orange, lilas, mauves, blanches des fleurs qui parsèment ici et là les nombreuses nuances de verts, il a tenté de partager avec nous sa vision de la nature.
De l’image, il se dégage une impression de grand calme, de sérénité. Mis à part un très léger frémissement, l’eau du lac est lisse comme un miroir.
Afin de mettre l’accent sur le côté terrestre, le photographe a opté pour un point de vue plongeant. Il a fermé l’espace mais à bien y regarder l’image n’est pas vraiment fermée puisque dans l’eau qui reflète le hors cadre, apparaît l’ouverture vers le ciel, la montagne…
Balthazar Burkhard est né à Berne en 1944, il a étudié la photographie auprès du photographe Kurt Blum.
C’est en 1965 qu’il a ouvert son propre studio de photographie et débuté une collaboration fructueuse avec la Kunsthalle Galerie Musée d’art de Berne (toujours en activité aujourd’hui).
Peu connu en dehors de la Suisse, son pays natal, Il a abordé beaucoup de genres (nu, nature morte, portraits) mais c’est dans la photographie de paysage, d’animaux, de nature qu’il excelle tout particulièrement.
En 1975, il décide de partir au USA afin de devenir acteur !
Son ambition se solde pas un échec. Il revient en Suisse et entreprend de réaliser de grandes images en utilisant le procédé très stable de l’Héliogravure ; technique classique très ancienne d’impression des images photographiques qui fait appel aux vertus de l’eau-forte (acide) sur cuivre et qui assure une pérennité aux images. Cette technique qui utilise des encres se rapproche de la peinture. Elle rend très subtilement les demi-teintes et les dégradés. Les aplats qu’elle traduit confèrent aux épreuves un moelleux, une troisième dimension que le cliché photo « ordinaire » n’offre pas.
Pour illustrer le mot du marathon, j’ai choisi une image de 2009, l’une de ses toutes dernières images.
Il est mort à Berne en 2010.
Balthazar Burkhard est curieux, il travaille à la manière d’un naturaliste dans le sens où il semble s’intéresser à la nature en tant que telle; les pierres, branches, feuilles, fleurs, plumes, poils, etc. sont pour lui sujets d’intérêt, tous aussi importants les uns que les autres, mais ce qui l’élève au rang d’artiste c’est l’approche poétique qu’il écrit en marge de la « préoccupation scientifique » et qui renvoie subtilement vers la peinture.
Quand on analyse ses photographies on s’aperçoit que les images qu’il compose dialoguent sans cesse avec l’histoire de l’art. Son travail se développe dans une relation constante avec ce médium qu’est la peinture en particulier et en cela on peut volontiers le rapprocher du courant pictorialiste qui nous ramène aux premiers temps de la photographie.
Avec la pente douce qui aboutit au lac, la parcelle de paysage semée d’herbes sauvages et de fleurs, le sentier, la montagne, il guide quiconque le souhaite dans un territoire qui invite à la rêverie. Ses compositions remarquables parviennent à révéler une dimension indicible de la nature qui n’est autre que sa beauté.